L’orthographe est une compétence primordiale pour la réussite scolaire, sociale et professionnelle, dont l’apprentissage est complexe, en particulier en français. De plus en plus de recherches empiriques démontrent le rôle de la conscience morphologique dans l’apprentissage de la littératie. La conscience morphologique correspond à la conscience de la structure morphologique des mots et à l’habileté à manipuler les morphèmes, soit les plus petites unités porteuses de sens. Ces unités morphémiques constituent des îlots de régularité qui rendraient la lecture et l’orthographe plus prédictibles. C’est pourquoi l’objectif de cette thèse est de mieux comprendre la contribution de la conscience morphologique sur l’orthographe lexicale d’enfants et d’adolescents francophones (de 6 à 14 ans). Dans le premier chapitre, une analyse exploratoire permet de mettre en évidence le rôle de plusieurs compétences dans l’apprentissage de l’orthographe lexicale : les compétences phonologiques et morphologiques, ainsi que la sensibilité aux régularités graphotactiques chez des enfants francophones (N=1102) en élémentaire. Dans un deuxième chapitre, nous précisons le rôle de la conscience morphologique sur les compétences ultérieures en orthographe lexicale auprès de deux échantillons d’enfants (N=292), suivis du Grade 1 au Grade 2 pour le premier, et du Grade 2 au Grade 3 pour le second. Une analyse par modélisation montre le rôle direct de la conscience morphologique sur l’orthographe générale de mots, et son rôle indirect via le décodage morphologique pour l’orthographe de mots plurimorphémiques, en contrôlant la conscience phonologique, le niveau de vocabulaire et le raisonnement non verbal. Le troisième chapitre présente une étude d’entraînement de la conscience morphologique chez des enfants tout-venant (N=70) en début de Grade 4 répartis aléatoirement en deux groupes (un est entraîné à la morphologie et l’autre à un entraînement visuo-sémantique). Les résultats montrent un effet d’apprentissage et de généralisation sur l’orthographe de mots plurimorphémiques, avec un maintien des progrès à long terme. Le quatrième chapitre est également constitué d’une étude d’entraînement de la conscience morphologique portant cette fois-ci chez des enfants et adolescents de 9 à 14 ans (N=82) présentant une dyslexie développementale (DD) répartis aléatoirement en deux groupes (un entraîné à la morphologie et l’autre continuant sa rééducation logopédique). Les résultats de l’entraînement montrent à nouveau un effet d’apprentissage et de généralisation sur l’orthographe de mots plurimorphémiques avec un maintien des effets sur le long terme. Dans une dernière partie, les résultats de ces travaux de recherche sont discutés à la lumière des modèles actuels de l’apprentissage de l’orthographe et de la conscience morphologique. Les principales contributions de cette thèse montrent que la conscience morphologique a un rôle prédictif, dès les premières années de l’école élémentaire, dans le développement des compétences orthographiques lexicales. Nos résultats soutiennent également l’hypothèse selon laquelle la relation qui unit conscience morphologique et orthographe est causale puisqu’au-delà de son pouvoir prédictif, l’entraînement de la conscience morphologique permet une amélioration des compétences orthographiques. La conscience morphologique apparaît donc comme un levier intéressant pour les enseignants et cliniciens.