La morphologie dérivationnelle est un domaine encore peu exploité dans la recherche scientifique en logopédie. Pourtant, de nombreuses études rapportent que la morphologie, et plus précisément la conscience morphologique (donc la capacité à manipuler des morphèmes), est un prédicteur des performances futures en lecture et en orthographe. De même, plusieurs méta-analyses parlent de l'effet bénéfique d'une intervention en morphologie sur la conscience phonologique, la conscience morphologique, la lecture et l'orthographe chez des enfants avec un Trouble Spécifique du Langage Ecrit (TSLE) (Galuschka et al., 2020; Goodwin & Ahn, 2010). De plus, il est établi que les enfants avec un TSLE utilisent la morphologie comme stratégie compensatoire pour pallier leur déficit en phonologie (Bowers et al., 2010; Champion, 1997; Reed, 2008). Or, ils utilisent mal cette stratégie compensatoire et effectuent alors beaucoup d'erreurs. C'est pourquoi, dans cette étude, nous avons testé un protocole de morphologie dérivationnelle chez des enfants entre 8 et 14 ans avec un TSLE dans le but d'améliorer leur conscience morphologique (effet direct), mais également leurs compétences en lecture et en orthographe lexicale (effets indirects). Pour cela, nous avons créé deux groupes : un groupe expérimental, où les participants effectuaient un entraînement en morphologie dérivationnelle, et un groupe contrôle qui n'avait aucune rééducation. Nous avons fait passer à tous les enfants un pré-test avant l'entraînement, un post-test immédiat directement après et un post-test à distance, deux mois après. Les tests étaient constitués de tâches en conscience morphologique, en lecture, en orthographe, en lexique et en raisonnement non-verbal. Notre hypothèse générale était que l'entraînement en morphologie dérivationnelle augmenterait les habiletés des enfants en conscience morphologique, en lecture et en orthographe. De plus, nous nous attendions à ce que l'amélioration des compétences se maintienne deux mois plus tard. Les résultats obtenus sont très encourageants et montrent une augmentation significative du groupe expérimental lors des post-tests sur toutes les épreuves de conscience morphologique, sur les items entraînés et non entraînés. Des résultats identiques sont retrouvés sur la précision de la lecture et sur l'orthographe de mots morphologiquement composés avec un effet d'apprentissage sur les mots entraînés mais également un effet de généralisation sur des mots nouveaux. Finalement, un autre élément très encourageant pour les perspectives cliniques futures est que les bénéfices se sont maintenus jusqu'à deux mois après la fin de la rééducation. Ainsi, un entraînement en morphologie dérivationnelle est efficace chez des enfants avec un TSLE pour pallier leurs difficultés en lecture et en orthographe.