Le séjour de Viret à Lyon entre 1563 et 1565 représente une étude de cas privilégié pour explorer les dynamiques de la diffusion de la Réforme en France dans une perspective culturelle et socio-politique. L'échange de publications polémiques entre le réformateur et le jésuite Emond Auger témoigne des efforts pour la construction d'une culture religieuse du politique qui fait appel au rôle spécifique des pasteurs pour la défense de leurs communautés respectives face au pouvoir civil. D'un côté comme de l'autre, l'imprimé est employé d'une façon stratégique dans une dynamique de confrontation confessionnelle où cependant la communication verbale – et gestuelle – demeure un des vecteurs essentiels pour la circulation des idées et la construction de l'opinion chez un public averti. Dès lors la production de Viret et d'Auger permet de comprendre le rapport dialectique du livre avec les gestes provocateurs qui marquent l'activité pastorale de corps ecclésiastiques opposés. Cette confrontation confirme la centralité de l'exemple lyonnais vis-à-vis de l'évolution politique et religieuse des églises réformées de France; en même temps, elle témoigne de l'attention croissante dont la figure de Viret est l'objet dans les années qui précèdent et qui suivent immédiatement la disparition de Calvin.