Le présent travail est centré sur la migration italienne dans la Suisse des Trente Glorieuses. Ce chapitre de l'histoire suisse et des migrations vers la Suisse est étudié ici du point de vue du cinéma des migrants mais aussi du cinéma sur la migration italienne en Suisse. Le but avoué de cette analyse est de comprendre comment se sont thématisées, durant cette période, les problématiques migratoires dans la réflexivité artistique, et comment l'expérience de la migration est vécue et remémorée par les agents du monde du cinéma : décrire ce regard – cette mémoire d'un groupe – et donc lire les tensions et les espoirs liés à la question migratoire, mais aussi ajouter une pièce au puzzle de la mémoire et de l'histoire du cinéma suisse et de la migration italienne. Les résultats du travail de recherche confortent l'hypothèse que les animateurs des ciné-clubs des CLI de l'époque, ainsi que les cinéastes suisses et italiens, ont constitué une configuration cinématographique partisane, composée d'agents sociaux visionnaires, entreprenants, d'agents de transformation et de médiation, ayant favorisé l'expression de nouvelles subjectivités, revendiqué de nouvelles formes de citoyenneté et soutenu la conception d'une nouvelle culture reliant dimension utopique et dimension pragmatique.