Comme dans le cas d'autres grands fleuves, les ouvrages hydroélectriques réalisés au cours du vingtième siècle le long du Rhône français ont provoqué une réduction des habitats aquatiques dans sa zone alluviale et une réduction de sa dynamique. Ces modifications nuisent gravement aux espèces qui en dépendent. L'un des buts du programme de restauration hydraulique et écologique du fleuve est de réhabiliter ses annexes aquatiques (encore appelées « bras morts » ou « lônes »). La présente étude s'inscrit dans un effort de suivi des effets de cette restauration sur les communautés d'invertébrés des lônes du Haut-Rhône français. L'objectif est d'utiliser la modélisation statistique pour définir un état de référence des communautés basé sur les données pré-restauration. Plusieurs types de modèles statistiques sont explorés pour associer les variations d'abondance de taxons sélectionnés aux variations de conditions environnementales. Ces modèles sont ensuite utilisés pour prédire les abondances des taxons après restauration. La structure des données soulève deux problèmes majeurs : la surabondances de zéros et les corrélations spatiales et temporelles entre les données. Une modélisation « classique » est réalisée par GLM (Generalized Linear Models) et GAM (Generalized Additive Models). La surabondance de zéros est traitée à l'aide de modèles à sur-représentation de zéros: ZIP (Zero Inflated Poisson) et ZINB (Zero Inflated Binomial). Puis des GLM hiérarchiques à effets croisés GLMM (Generalized Linear Mixed Models) sont utilisés pour tenir compte des corrélations des données. Les résultats montrent des prédictions assez bonnes sur les données de calibration avec une nette supériorité de la qualité des GLMM sur l'ensemble des autres modèles. Cependant, les prédictions réalisées sur données post-restauration sont toutes très éloignées des valeurs observées. Les résultats montrent que les problèmes de corrélation spatiale et temporelle des données sont à prendre en compte pour toute tentative ultérieure d'établir un tel état de référence. Les écarts importants entre prédictions et observations post-restauration demandent à être analysés pour faire la part entre des problèmes intrinsèques aux méthodes de prédiction et la déviation effective des communautés d'invertébrés dans les milieux restaurés.