Selon la demande du bilan psychologique, le psychologue peut s'appuyer sur l'interprétation de tests cognitifs – tels que les populaires Échelles de Wechsler – pour poser des diagnostics et orienter les prises en charge. Étant donné les enjeux inhérents à de telles décisions, il est important de s'assurer que les différences observées sur les scores d'un test cognitif traduisent bel et bien des différences interindividuelles dans le fonctionnement intellectuel des individus, et non des différences liées à d'autres caractéristiques (ethnie, genre, milieu socio-économique). Pour l'adaptation française du WISC-IV – quatrième édition de l'Échelle d'Intelligence de Wechsler pour Enfants et Adolescents –, une préexpérimentation sur un échantillon de 220 enfants a abouti à une sélection d'items possédant les qualités métriques requises. Ainsi, les items du WISC-IV retenus ne devraient pas (dé)favoriser les enfants selon leur genre ni leur milieu socio-économique. Cependant, si l'impact du statut socio-économique des parents sur les performances intellectuelles de l'enfant est bien connu, l'influence de la profession de chaque parent est rarement examinée de manière distincte. Dans notre étude, nous examinerons cette question de façon exploratoire. Par ailleurs, des recherches montrent que différents niveaux d'habileté s'observent selon le sexe, notamment dans les tâches visuospatiales et verbales. Généralement, les garçons obtiennent des scores plus élevés en rotations mentales, tandis que les filles montrent de meilleures performances sur les tâches verbales. Le WISC-IV ne propose néanmoins pas de barème séparé pour les sous-tests spatiaux ou verbaux. Comme la validité de l'interprétation des scores peut être compromise par des mesures dont la précision est affectée par des items biaisés à l'encontre d'un groupe particulier, les objectifs de cette étude sont d'évaluer l'influence des variables âge, sexe et professions des parents sur les items des sous-tests du WISC-IV. Le fonctionnement différentiel des items est également examiné, ainsi que la proportion de variance expliquée par l'âge et le statut socio-économique des parents. Notre échantillon comprend 483 enfants (230 filles et 253 garçons) non consultants de 7 à 12 ans (moyenne = 9.04 ans ; écart type = 1.31 ans) à qui on a administré les dix sous-tests principaux du WISC-IV et le sous-test complémentaire Complètement d'images. Les scores des items des sous-tests sont modélisés à l'aide d'un modèle de réponse à l'item logistique à 2 paramètres (cotations dichotomiques), ainsi que d'un modèle de réponse à l'item gradué de Samejima (cotations polytomiques). Pour modéliser le fonctionnement des items de chaque sous-test, on a procédé de la manière suivante : Dans un premier temps, on a spécifié qu'une variable latente unique influençait les résultats de chacun des items. Ce modèle unidimensionnel postule qu'une dimension psychologique propre à chaque sous-test prédit les performances à chacun des items. Dans un deuxième temps, on a introduit la variable âge comme co-varié. Cette modification permet d'évaluer dans quelle proportion les scores latents peuvent être expliqués par l'âge des participants. On a ensuite introduit à tour de rôle d'autres co-variés représentant les variables sociodémographiques : profession du père, profession de la mère et sexe des participants. Dès lors, il est possible de vérifier si ces variables ont un effet direct sur les scores latents pour chacun des sous-tests. La dernière étape consiste à mettre en évidence un éventuel fonctionnement différentiel des items. Pour ce faire, on examine les indices de modifications issus de la procédure d'estimation. Si un lien direct entre un co-varié et l'un des items d'un sous-test est suggéré, cela signifie que l'item en question fonctionne différentiellement selon la modalité de l'une ou l'autre variable sociodémographique examinée. En effet, en l'absence de biais, on s'attend à ce que la variable latente de la dimension évaluée par le sous-test soit la seule et unique source de variations dans les scores des items. Nous avons exclu des analyses les épreuves de l'Indice de Mémoire de Travail (IMT) et ceux de l'Indice de Vitesse de Traitement (IVT). En effet, il est peu justifié de supposer un fonctionnement différentiel sur certains items des sous-tests d'IMT et il n'est pas possible d'ajuster un modèle de réponse à l'item sur les données des sous-tests d'IVT. Quant aux épreuves de l'Indice de Compréhension Verbale (ICV) et de l'Indice de Raisonnement Perceptif (IRP), seuls ont été conservés les sous-tests présentant un ajustement satisfaisant au modèle unidimensionnel. Ainsi, les résultats pour trois sous-tests d'IRP (Cubes, Identification de concepts et Complétement d'image) et un sous-test d'ICV (Compréhension) seront présentés par la suite. Les professions sont classées en 10 catégories inspirées de la Classification internationale type des professions réactualisée en 2008 (CITP-08). Les résultats montrent une influence directe des variables âge et professions sur les scores latents. La contribution séparée de la profession des parents a été évaluée. Si on observe un effet de la profession de la mère et/ou un effet de la profession du père sur les performances aux sous-tests, les résultats du test de Wald ne révèlent en revanche aucune différence statistiquement significative entre la contribution de la profession d'un parent par rapport à l'autre. Dans l'épreuve des Cubes, on relève une influence de la variable sexe, suggérant des scores légèrement plus élevés chez les garçons (β = - 0.11). Un fonctionnement différentiel des items n'est jamais mis en évidence. Enfin, la variable âge explique entre 26.1% (Cubes) et 46.7% (Compréhension) de la variance des scores latents, tandis que la profession des parents permet de rendre compte de 0.88% (Complètement d'images) à 5.2% (Identification de concepts) de la variance des scores. Dans notre échantillon de 483 enfants, on relève ainsi une influence de la profession des parents sur les performances de l'enfant. Les sous-tests du WISC-IV ne favorisent toutefois pas un sexe par rapport à un autre. L'étude du fonctionnement différentiel des items ne révèle pas de variations liées au groupe d'appartenance des enfants.