La thèse porte sur la communication olfactive impliquant les individus, en position d'interactants, lors de situations de communication de «face-à-face». Nous pensons que porter un parfum est une forme d'intention communicative sur ce que le sujet parfumé communicant aspire à être. Dans le champ des sciences de l'information et de la communication, la communication olfactive est étudiée dans un contexte théorique mobilisant des ressources issues de l'interactionnisme et de l'ethnométhodologie. Se parfumer, apparaissant comme une envie de communiquer sur son soi, nous essayons de mieux comprendre les processus de construction identitaire en articulation avec le soi. Cependant, comme l'odorat est un sens très intimiste, se référant notamment aux expériences olfactives passées, la qualité d'un parfum est une donnée très subjective. C'est pourquoi, sur le plan méthodologique, nous avons construit un protocole, axé sur la notion d'interaction (Goffman), afin de manipuler différents contextes d'échanges. L'objectif est de mieux comprendre quel rôle le parfum joue dans diverses situations de communication interpersonnelle. Une enquête qualitative a été menée sur 35 sujets, issus deux pays voisins, la Suisse et la France. Chaque interview en profondeur est basée sur un test projectif où le sujet est amené à construire la représentation d'un individu communiquant en fonction d'une senteur. Les résultats montrent que ne pouvant nous «réapproprier» la perception de l'autre, nous sommes contraints d'inférer, à partir de son comportement et de notre propre expérience, ce qu'il ressent. Le sujet infère des informations qu'il juge adéquates et pertinentes sur l'autre en se basant sur son vécu expérientiel en lien avec le parfum qu'il sent : l'odeur devient un dispositif d'information qui véhicule des données précédemment encodées. L'individu parfumé est alors un dispositif communicationnel exposé au nez de l'interactant. Ce dernier, récepteur de la communication olfactive, infère les intentions communicatives de l'individu parfumé à partir de l'odeur qu'il perçoit. L'odeur est un «marqueur moral» (Le Breton, 2006), révélatrice de ce que nous sommes intrinsèquement, en tant qu'individu, la bonté sent bon, tout ce qui est de l'ordre du malsain « empeste ». La thèse montre qu'hommes et femmes n'ont pas les mêmes impressions olfactives à propos des mêmes parfums, qu'il existe des formes de corrélations olfactives en termes d'imaginaire d'un individu à un autre, indépendamment de l'âge et du pays d'origine. Conduisant à construire une identité sociale, certains parfums inspirent plus de sympathie, voire de naïveté que d'autres. A l'inverse, certains provoquent du mépris et même du dégoût