Cette thèse se propose de réfléchir aux rapports entre littérature et connaissance à partir de l’œuvre de Marcel Proust. Elle se concentre sur deux moments du xx^e siècle : les années 1900-1920, moment de l’écriture et de la parution de À la recherche du temps perdu, et les années 1960, moment de la redécouverte de l’œuvre de Proust en France. Elle vise principalement à montrer que le dialogue critique entretenu par l’écrivain avec les disciplines des sciences de l’homme en formation lui permet d’élaborer un nouveau modèle de savoir, une véritable théorie de la connaissance, qui entretient plusieurs points communs avec l’anthropologie structurale théorisée par Claude Lévi-Strauss une trentaine d’années plus tard. Mais elle s’efforce également d’interroger la réception de l’œuvre de Proust en 1960 justement, au moment où le structuralisme devient le paradigme dominant dans le champ intellectuel français. À cette époque, l’œuvre de Proust est un catalyseur de pratiques très contrastées : alors qu’elle est érigée en modèle d’intransitivité dans la discipline littéraire (qui tend à dénier à la littérature son ambition de connaissance), elle accompagne le renouveau épistémologique qui est théorisé avec force dans les sciences sociales.