Dans une période qui voit croître à une vitesse exponentielle les différentes manières de consommer l’information, il paraît pertinent d’établir un diagnostic du métier de journaliste. La montée en puissance des réseaux sociaux depuis les années 2010 semble avoir eu un impact tantôt positif, tantôt négatif sur l’exercice d’écriture des journalistes. L’accès à l’information est grandement facilité par des moyens de communication de plus en plus performants mais cette évolution s’accompagne paradoxalement par une chute de l’emploi dans le secteur, ou du moins par une inquiétude grandissante sur le futur du métier. Les nouveaux moyens offerts au journalisme de presse s’incarnent dans l’utilisation des métriques, des outils de statistiques permettant de quantifier leurs impacts sur les réseaux sociaux et leurs propres sites web. Le travail de l’audience a donc pris une part grandissante au sein du métier de journaliste. Dans cette optique, cette recherche vise à comprendre comment une rédaction de presse écrite a subi ces changements et a modifié, ou non, sa manière de modeler et produire de l’information. Pour ce faire, une enquête a été menée au sein de la rédaction du Courrier, quotidien romand basé à Genève, qui utilise très peu voire aucune métrique pour produire de l’information. Sept entretiens semi-directifs ont été organisés avec des journalistes de la rubrique locale afin de déterminer si le journal avait quand même pris ce tour de l’audience et avait modifié ses façons de composer des articles. L’occasion pour les journalistes de nous faire part de leurs inquiétudes quant à l’avenir du quotidien et du journalisme en général mais aussi de donner des clés de lecture supplémentaires. Les résultats démontrent que le Courrier a un profil bien particulier à Genève, tant au niveau de sa ligne éditoriale que dans sa manière de proposer de l’information. Seul journal à ne pas suivre le nombre de clics, le taux de rebond ou encore le nombre de visite par jour sur le site web, les journalistes font face à une grande liberté rédactionnelle et à un climat de travail très agréable. Cela étant, ces aspects positifs entraînent des conséquences plus négatives sur leurs motivations, leurs satisfactions quotidiennes ou encore leurs sentiments quant à leur place dans l’univers médiatique genevois et suisse.