Le 17 octobre 2019, des milliers de Libanais descendent dans les rues pour contester l’ordre politique établi depuis la fin de la guerre civile. Pour la première fois dans l’histoire du Liban, en seulement quelques heures, un mouvement civil national va naître de la contestation qui sera largement présentée comme Thawra. Au nord du Liban, à Tripoli, deuxième ville du pays considérée comme l’agglomération la plus pauvre de la méditerranée, la contestation semble dégorger une vigueur plus importante qu’ailleurs : il semblerait que Tripoli guide la contestation nationale. Seulement, dans l’histoire contemporaine et sociologique de la ville, aucune explication ne laisse imaginer qu’un mouvement national pouvait y naître. Échec de l’adhésion nationale des Tripolitains au Liban, abandon et délaissement de l’organisation nationale, marginalité économique et politique : la ville est l’antithèse d’un processus inédit de changement à l’image de la Thawra. Ce travail vise à éclairer et comprendre davantage les raisons qui expliquent cet engagement révolutionnaire des Tripolitains. Au travers d’une étude au carrefour des disciplines historiques, sociologiques et politiques, volonté est faite de mettre en lumière les habitants d’une ville qui auraient dû être considérés plus tôt comme des acteurs incontournables de l’identité libanaise.