A travers quelques observations sur la définition et le contenu des biozones d'ammonites actuellement reconnues ou proposées, les auteurs illustrent les contraintes et les limites d'un concept, par ailleurs indispensable, sur lequel repose la stratigraphie du Crétacé inférieur. Certaines contradictions et imprécisions sont dénoncées dans les biozonations actuelles du Valanginien et de l'Hauterivien basées sur les ammonites. Tout en rappelant leur valeur fondamentale, les auteurs en relèvent la complémentarité avec la stratigraphie séquentielle: d'une part celle-ci permet d'affiner le découpage lithostratigraphique parfois au banc près, d'autre part elle peut s'appliquer au domaine de plate-forme généralement dépourvu d'ammonites. Les successions d'orbitolinides jusqu'ici utilisées pour les corrélations dans les Calcaires urgoniens sont également analysées et critiquées. Une nouvelle échelle biostratigraphique des orbitolinides, proposée pour la première fois pour l'intervalle Hauterivien supérieur - Bédoulien, a été établie en des coupes de référence abritant dans les mêmes niveaux orbitolinides et ammonites: les successions d'orbitolinides observées sont donc très étroitement reliées à la biozonation des ammonites. Grâce à l'utilisation conjointe de cet outil biostratigraphique et de l'analyse séquentielle, des corrélations plate-forme carbonatée/bassin solidement argumentées ont permis l'établissement d'un modèle d'évolution de la plate-forme urgonienne du Jura au Vercor méridional. Les différentes étapes en sont les suivantes: apparition des premiers faciès urgoniens dans le Jura neuchâtelois/vaudois à la fin de l'Hauterivien inférieur; progradation de la plate-forme urgonienne, du Jura suisse au Vercors méridional, durant l'Hauterivien supérieur et le Barrémien inférieur, associée à une émersion progressive de la frange litorale; aggradation durant le Barrémien supérieur et le Bédoulien inférieur. Tandis que les calcaires à rudistes atteignent leur extension maximale en direction du bassin, les faciès marins envahissent à nouveau une partie du domaine précédemment émergé; exondation de l'ensemble de la plate-forme carbonatée (régression "forcée" en termes de stratigraphie séquentielle) au Bédoulien moyen et disparition des faciès urgonien.