La réglementation des campagnes de récolte de signatures
La récolte de signatures est la base de la démocratie directe en Suisse. Cette forme de démocratie permet aux citoyens suisses de participer activement à l’élaboration de règles légales dans le pays. Au niveau fédéral, elle peut prendre la forme de l’initiative populaire, visant à inscrire de nouvelles règles dans la Constitution fédérale, ou du référendum facultatif, permettant de remettre en question un acte adopté par l’Assemblée fédérale.
La collecte de signatures permet aux citoyens de contribuer à soumettre un texte à la votation populaire. Elle est censée représenter la volonté populaire, dans le sens où, hormis en cas de référendum obligatoire, seuls les textes pour lesquels les citoyens ont un intérêt seront effectivement soumis au vote.
Cependant, une nouvelle pratique, la récolte rémunérée de signatures, pourrait mettre en péril le principe de la libre formation de la volonté populaire. En effet, plusieurs médias ont récemment relevé différents abus souvent liés à cette pratique. Parmi ces abus, l’on retrouve la communication d’informations trompeuses aux signataires des initiatives et référendums, la falsification de signatures et la récolte de signatures sans mandat. Ces excès font ressortir le but principal des récolteurs rémunérés de signatures, qui est de récolter un maximum de signatures afin d’augmenter leur rémunération.
Cette pratique s’est largement répandue au fil des années, au point qu’elle a posé en 2004 la question d’une interdiction. Le Conseil fédéral a cependant rejeté une telle idée, sous prétexte que cela atteindrait les droits d’initiative et de référendum. Le gouvernement craignait aussi que le nombre d’initiatives et de référendums aboutissant n’explose, sans pour autant faire un lien entre la rémunération, l’atteinte à la libre formation de la volonté populaire et le nombre de textes aboutissant.
Cette idée de l’interdiction de la récolte rémunérée de signatures est revenue suite à la révélation des récents abus par les médias. Certains acteurs politiques prônent une interdiction pure et simple de cette pratique, d’autres un meilleur encadrement et une plus grande transparence. Bien que l’interdiction n’ait jamais fait l’objet d’une réglementation au niveau fédéral, le canton de Genève a expressément interdit cette pratique dans sa LEDP/GE.
Dans ce travail, nous nous demanderons si la récolte rémunérée de signatures a une influence directe sur la libre formation de la volonté populaire. Nous examinerons également si cette pratique peut être valablement admise, respectivement restreinte. A cet effet, nous nous poserons la question suivante : Quel est le rôle des campagnes de récolte de signatures, et de quelle protection doivent-elles bénéficier ?
Pour répondre à cette question, nous définirons tout d’abord la notion de récolte de signatures (I), puis nous exposerons le cadre légal de la récolte de signatures en Suisse et à Genève (II). Nous nous pencherons ensuite sur la protection de la récolte de signatures (III), avant d’analyser ses limites (IV). Dans ce dernier point, nous présenterons également les différentes solutions proposées au niveau politique.
- PID : unige:183604