Cette interprétation de la relation du premier voyage de Vasco de Gama aux Indes (1497-1499) tente de renouer avec une géographie de l'expérience. Elle montre que cette géographie de plein vent de la Renaissance n'est pas sans parenté avec la géographie humaniste contemporaine, sur le plan d'une perception phénoménologique du monde. Elle vise à questionner directement le texte du marin anonyme ayant transcrit cette expédition et pose la problématique de l'exotisme, de l'identité et de l'altérité. Nous démontrons qu'au cours de cette Grande Découverte relativement précoce, les thèmes subséquents du décentrement et du relativisme culturel ne sont pas encore prioritaires. En revanche, dans le cadre d'une épistémologie de la découverte, la valeur fondamentale de ce texte qui est relevée est la suivante : c'est l'essai d'appropriation mentale d'un monde encore largement inconnu et inexploré par les chrétiens. Rendre familières les populations rencontrées plutôt que d'en montrer le caractère exotique semble être le motif dominant du transcripteur.